Extraits
Extraits d’enregistrements de Thérèse Diette lors de concerts en public.
Variations pour piano sur « Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen », de la cantate BWV 12 de J.S. Bach (1862) S180 (extrait) - Franz Liszt
Thérèse Diette, piano
Sur piano Kawai
Liszt s’est installé à Weimar en 1848 avec la princesse Carolyne de Sayn-Wittgenstein. Pendant 13 ans, il s’y consacre à la composition, et à la promotion de compositeurs comme Berlioz et Wagner.
C’est là qu’il commence après la mort de sa fille Blandine, en septembre 1862, la composition de ses Variations sur « Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen » (« Pleurer, gémir, se tourmenter, désespérer… ») sur le motif de la cantate BWV 12, l’une des toutes premières composées à Weimar par J.S. Bach, en 1714.
Le thème utilisé en demi-tons descendants est la basse obstinée du 1er chœur de la cantate, basée sur les notes B, A, C, H, et que Bach a réutilisée dans le « Crucifixus » de sa messe en Si mineur BWV 232. La douleur et la souffrance s’expriment à travers toute cette œuvre. La résignation et la consolation apparaissent avec le thème lumineux du choral final de la même cantate :
« Was Gott tut, das ist wohl getan » (« Ce que Dieu a fait est bien fait »).
« Die Trauer-Gondel » S200/2 (1886) (extrait) - Franz Liszt
Thérèse Diette, piano
Sur piano Steinway
Salle Cortot, Paris
Le 19 novembre 82, venant de Weimar, Liszt arrive à Venise, et loge au Grand Canal, chez les Wagner au Palazzo Vendramin. Ce fut leur dernière rencontre : Wagner mourut après son départ du 13 février 1883. Au cours de ce séjour Liszt composa la « Trauer Gondel » (Gondole de Tristesse), où il eut la prémonition, comme il le confirmera plus tard, que Wagner mourrait à Venise et que son corps serait donc transporté sur une gondole funèbre.
Liszt révisa plusieurs fois cette pièce, et l’allongea plus tard, changeant la mesure de 6/8 à 4/4, tout en conservant le balancement de la gondole et l’âpreté de la ligne mélodique. Il en fit deux versions, puis des versions également pour violon ou violoncelle et piano.
La musique que Liszt écrivit ici (2è version) est toute empreinte de tristesse dans un rythme de barcarolle que viennent interrompre des accents de douleur violente dans les récitatifs.
« Schlaflos, Frage und Antwort » S203 (1883) - Franz Liszt
Thérèse Diette, piano
Sur piano Kawai
« Sans sommeil ! Question et réponse »
Cette pièce est inspirée du poème d’Antoni (Antonia) Raab, élève autrichienne de Liszt dont la poésie n’a pas été retrouvée.
Selon l’un de ses autres élèves, August Göllerich, Liszt avait observé à Venise des gondoles emporter des cercueils vers le cimetière, d’où cette question, posée par un thème haletant, très agité, « schnell und leidenschaftlich », (vite et passionné), pièce orageuse avec ses arpèges d’une harmonie assez ambigüe.
La « réponse », « Andante quieto », est un choral calme avec une harmonie très limpide, excepté quelques accords sombres.
Liszt offre quelques passages alternatifs dans la pièce, ce qui donne la possibilité de plusieurs versions.
Sonetto del Petrarca « I' vidi interra angelici costumi » S270/2 (1864-1882) (extrait) - Franz Liszt
Françoise Masset, soprano, Thérèse Diette, piano
Sur piano Steinway
Concert à l’Abbatiale, Festival de Guîtres (Nouvelle-Aquitaine)
Sur un poème de Francesco Petrarca (1304-1374)
Amour pour Laura sublimé en amour divin.
Longtemps considérés comme les inoubliables témoignages des années 1838-39, qui sont les années où Franz Liszt et Marie d’Agoult sillonnaient l’Europe, la musique des sonnets fut écrite bien plus tardivement, et publiée entre 1847 et 1883, en quatre versions, pour voix et piano, et pour piano seul, éditées ensuite dans les « Années de Pèlerinage ».
Il faut savoir – si l’on veut encore parler de l’Europe – que Pétrarque créa, au cours de ces rencontres, un réseau culturel qui couvrait l’Europe et se prolongeait même en Orient. Il demanda à ses relations et amis qui partageaient le même idéal humaniste que lui de l’aider à retrouver dans leur pays, leur province, les textes latins des anciens que pouvaient posséder les bibliothèques des abbayes, des particuliers ou des villes.
Ses voyages lui permirent de retrouver quelques textes majeurs tombés dans l’oubli.
C’est à Liège qu’il découvrit le Pro Archia de Cicéron et à Vérone, Ad Atticum, Ad Quintum et Ad Brutum de Cicéron également. Un séjour à Paris lui permit de retrouver les poèmes élégiaques de Properce. En 1350, la révélation de Quintilien marqua, aux dires du poète, son renoncement définitif aux plaisirs des sens.
1ère Polonaise de l’Oratorio St Stanislas - S519 - Franz Liszt
Thérèse Diette, piano
Sur piano Steinway
Salle Cortot, Paris
Les deux Polonaises de l’Oratorio St Stanislas furent écrites pour piano solo, et sans doute dans la pensée de la comtesse polonaise Sayn-Wittgenstein. Liszt y travailla pendant plus de 12 ans, jusqu’en 1885.
Il y ajouta le Psaume 130 « De Profundis » (Du fond de l’abîme, je crie vers toi Seigneur), qui parut en 1883, mais l’Oratorio dans son ensemble ne vit pas le jour, sans doute à cause de ses pièces trop diversifiées pour former un ensemble cohérent.
Cette première polonaise fut commencée en 1870, très sombre, dont le rythme disparaît complètement à la fin pour donner lieu à des accords mystiques.
« Venedig » et « Musik im Mirabell » - Hans van Sweeden
Thérèse Diette, piano
Sur piano Steinway, création française
Hans van Sweeden (1830-1863), compositeur, acteur, poète, écrivain, danseur, mort à 24 ans. Professeur au Conservatoire de la Haye.
Trois Nachtstücke – deux pièces ici – sur un poème de Georg Trakl, Die Schöne Stadt.
- « Venedig » (Venise) : « Enfant, ton souvenir maladif m’a suivi sans bruit dans le sommeil »
- « Musik im Mirabell » (résidence des archevêques à Salzburg) : « Un étranger blanc entre dans la maison, un chien se jette dans les couloirs délabrés, la servante éteint une lampe, l’oreille entend de nuit des accords de sonate »
Ces pièces ont été composées à l’instigation et créées par Ton Hartsuiker, mon professeur, ami et Directeur du Conservatoire d’Amsterdam (il habitait l’étage au-dessus de Van Sweeden).
En 1983 est sorti un film sur la vie de ce musicien : « Hans, het leven voor de dood » (littéralement « Hans, la vie avant la mort » livre paru en 1983). Ce film dresse un portrait de la jeunesse des années 1950-1960, dans un contexte de post-nazisme.
Hans van Sweeden avait une grande admiration pour Webern. On sent ici une forte influence de Berg.
Diérèse (création 1994 - extraits) - Sophie Leclerc
Thérèse Diette, piano
Sur piano Kawai
La Rochelle
« Diérèse », première oeuvre pour piano de Sophie Leclerc (1964) dédiée à Thérèse Diette.
Création mondiale le 18 décembre 1994 à La Rochelle.
Extrait d’une oeuvre très riche dans ses multiples aspects compositionnels, et d’une imagination créative très personnelle.
Sophie Leclerc, compositeur et pédagogue, étudie l’analyse musicale et la composition au C.N.S.M. de Paris, et soutient une thèse de D.E.A. à l’Université de Paris VIII.
Professeur honoraire de musicologie à l’Université de Bourgogne.
Parmi ses oeuvres les plus significatives :
- un Septuor
- « Cassandre » pour deux quintettes à cordes, percussion et harpe
- « Syzygies » pour orchestre (3.3.3.3 – 4.3.3.0 – 3 perc, hp, pno-cel, cordes)
Création par l’Orquesta Sinfonica `de RTVE, avec laquelle elle obtient
le Premier Prix international de Composition « Reina Sofia » d’Espagne (1990)
(W. Lutoslawski, Prix 1986) où l’on décèle les Influences de Boulez, Stockhausen, Nunes and Ferneyhough.
Makrokosmos (« Love-death music ») (1972-73) : Primeval Sounds (1/I), Rain-Death (3/II) (Extraits) - George Crumb (1929-2022)
Thérèse Diette, piano
Sur piano Steinway
Salle Cortot
Makrokosmos (« Love-death music ») (1972-73) pour piano et piano amplifié (extraits).
Le nombre de ces pièces n’est pas anodin : 24 pièces de Fantaisies en deux cahiers, d’après le Zodiaque pour piano amplifié. Les références symboliques parsèment cette musique. Elles sont bibliques, ésotériques, cosmiques, ou tout simplement fantaisistes. Chaque pièce fait référence à un signe du zodiaque, mais ils ne sont pas dans l’ordre.
Quelques précisions techniques sur l’amplification :
- exploitation imaginative des 3 pédales, effets produits au contact des cordes, pizzicato dans les cordes, microphone suspendu au-dessus des cordes
- seulement 3 dispositifs externes, dans quelques pièces :
Feuilles de papier sur les cordes, verres que l’on roule sur les cordes, brosse métallique de percussion
Primeval Sounds (1/I)) Cancer- (Extraits)
Sombre et mystérieux
Il s’agit du chaos originel , du « Tohu bohu » dont parle la Genèse.
On pense aussi aux mots de Pascal « le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie »
Rain-Death (3/II) Poissons
Variations de la Pluie-Mort, la Mort par la Pluie – cristallin, avec élégance
Makrokosmos (« Love-death music ») (1972-73) : Dream Images (11/I), Tora Tora Tora (7/I), Une Prophétie de Nostradamus (8/II) (Extraits) - George Crumb (1929-2022)
Thérèse Diette, piano
Sur piano Steinway
Salle Cortot
Makrokosmos (« Love-death music ») (1972-73) pour piano et piano amplifié (extraits).
Dream Images (11/I) Gémeaux (Extraits)
Images de rêve, Musique de l’Amour-Mort – rêveur, comme la douce caresse d’une musique dont on se rappelle vaguement
C’est l’illustration d’un rêve ici qu’évoque l’américain George Crumb, douce respiration amoureuse qu’entremêlent des souvenirs, quelquefois vagues ou parfois plus prégnants, comme si le rêve devenait une réalité tangible, point d’insertion de son esprit dans le vaste processus du monde. « Poétique des ailes », chère à Gaston Bachelard, qui permet d’atteindre dans la musique et la poésie le sens profond des créatures jusqu’à l’extinction de la réalité sensible.
Réminiscences ici de la Fantaisie-Impromptu de Chopin en do# mineur.
Procédé technique de collages, rencontrés fréquemment à l’époque, par exemple chez Luciano Berio (Sinfonia pour 8 voix et orchestre, 1968)
Tora Tora Tora, Cadence apocalyptique (7/I) Scorpion
Dramatique, avec intensité, violent impitoyable
Une Prophétie de Nostradamus (8/II) Bélier (Extraits)
500 ans après, Crumb réactualise en musique l’effroi des prophéties de Michel de NostreDame (nom Nostra-damus : « nous donnons les choses qui nous sont nôtres »)
On peut penser à un contemporain de la Renaissance, Pietro Baldi del Riccio, dont Nostradamus aurait emprunté les écrits :
La grand’estoile par sept jours bruslera,
Nuée fera deux soleils apparoir :
Le gros mastin toute nuit hurlera
Quand grand pontife changera de terroir.
Klavierstücke pour piano (1907-08) (extraits) - Alban Berg
Thérèse Diette, piano
Sur pianoforte Erard 1941
Chapelle de l'Église de l'Étoile
Ces oeuvres sont de la jeunesse de Alban Berg. Il a 22 ans, étudie encore avec Schoenberg. Plutôt que des « oeuvres » à proprement parler, ce sont des exercices de composition que l’on a découverts en pièces éparses, en copies, en manuscrits, ou en brouillons. Berg n’avait pas en effet jugé bon de les recopier, ne pensant pas qu’elles seraient jouées.
Ces pièces révèlent une grande admiration pour Schumann- thèmes mélancoliques, valse viennoise, éléments orchestraux et très contrapunctiques – aussi peut-être le souvenir de cette liaison avec Marie Scheuchl dont il eut un enfant qu’il reconnut – son unique enfant.
Berg abandonnera les fonctions tonales classiques en 1909 pour adopter la technique des douze sons (« dodécaphonisme ») en 1926.
Étude 38, du « Cours complet » - Hélène de Montgeroult
Thérèse Diette, piano
Sur pianoforte Erard 1941
Création, Chapelle de l’Eglise de l’Etoile
Études du « Cours Complet » de Hélène de Montgeroult (1764-1836)
Hélène de Montgeroult, élève de Hüllmandel et Dussek, peut être considérée comme la première compositrice romantique en Europe. Pianiste interprète et improvisatrice, elle exerce son grand talent dans les salons, notamment ceux de Madame de Staël (1766-1817), où elle suscite l’admiration. Grâce à Sarrette, fondateur du tout récent Conservatoire de Paris, elle sauve sa tête de la guillotine sous la Terreur, et devient en 1795 la première femme à enseigner la musique dans un établissement de la République devant une classe exclusivement masculine !
Sa vie l’entraîne à composer une musique d’intériorité refusant le « commerce de la virtuosité » alors en pleine expansion. Qualifiée de « savante musicienne » et donc peu comprise alors en France, elle n’en compose pas moins une musique où l’émotion se mêle profondément à une science pédagogique très réfléchie. En 1834, elle gagne la Toscane et meurt à Florence deux ans plus tard.
Son monumental Cours complet, commencé vers 1788 et achevé en 1812, se composant de 3 volumes avec 972 exercices, 114 études progressives, des thèmes avec variations, trois fugues, un canon et une Fantaisie en sol mineur, montre que le piano romantique était déjà présent à Paris sous la Révolution et l’Empire – bien avant l’essor de Mendelssohn et de Schumann.
Il existe trois éditions, dont deux à Paris que j’ai découvertes à la BNF bien avant leur numérisation. Quant à la 3è, l’édition Launer, elle contient également des corrections, mais ne se trouve qu’à la Biblioteca Cherubini de Firenze, et sur laquelle j’ai travaillé en 2022.
L’étude 38 est une pièce très expressive, d’un sentiment tendre et mélancolique.
Nocturne op 368 en réb M (vers 1831) - Carl Czerny
Thérèse Diette, piano
Sur pianoforte viennois Streicher 1847, sans le double-échappement des pianos français (Erard)
Récital Paris, Musée du Petit Palais
Carl CZERNY le « mal aimé » (1791-1857)
On connaît mal toutes les œuvres de Carl Czerny, élève de Beethoven, professeur de Liszt.
Sa production presqu’effarante se compose de plus de 900 pièces éditées pour piano : sonates, variations, fantaisies etc… dont 8 nocturnes op 368, parmi les 30 nocturnes édités.
Celui-ci en réb majeur commence avec les mêmes harmonies que celui de Chopin op 27 n° 2.